Le Canada déclare la guerre le 10 septembre 1939. Aussitôt, des hommes et des femmes s’engagent . 75% rejoignent l’armée de terre, 12,5% l’aviation, et 6,1% la marine. D’autres servent dans la marine marchande, les forces armées américaines et les Corps auxiliaires féminins.
22 000 soldats de l’armée de terre, 17 000 aviateurs et 2 000 matelots perdront la vie durant les combats.
Mobilisation du North Shore
A l’automne 1939, on propose au North Shore d’ assurer la défense côtière. Mais le Lt Colonel Leger refuse cette offre. Il espère que le régiment sera inclus dans la brigade.
Le 5 juin 1940, l’unité est incluse dans la 8e brigade de la troisième division canadienne.
Au début de la guerre, ces hommes ont pour tâche de garder des ponts ferroviaires à Derby et Upper Nelson. Lorsque des vétérans leur succèdent, certains de ces homes rejoignent le Carleton Yorks car ils étaient certains que cette unité serait bientôt mobilisée.
En avril 1940, le major Clarke annonce qu’il faudra peut-être un certain temps avant que le North Shore soit appelé. Le North Shore commence cependant a mobilisé et ces hommes sont impatients de partir faire la guerre.
L’unité entière est ensuite regroupée, au mois de juin, à Woodstock, où elle poursuit son en-traînement. Celui-ci se déroule principalement au milieu de la rivière et c’est sur cette île que se crée l’esprit de corps qui caractérise le Régiment du North Shore et lui vaudra ses succès comme unité de combat. L’unité est alors installée dans des immeuble. Les sergents occupent des petits chambres à l’étage. Les hommes, eux, sont parqués un peu comme des moutons au rez de chaussée.
Souvent, pour se distraire le soir, des hommes se rendent en ville. Comme ils ne peuvent pas rentrer au camps par le pont, où les gardes les auraient remarqués, ils passent par le fleuve dans lequel ils marchent avec leurs bottes aux pieds pour ne pas se blesser. Très rapidement, ils trouvent un gué. Mais celui-ci à l’inconvénient d’arriver devant la tente du prêtre du régiment , le major Hickey, qui possède un saint Bernard qui se met à aboyer. Le Major Hickey organise souvent des distractions. Sous une tente, il installe un piano, trouve quelques violons qui font danser et réchauffent les cœurs. Jour après jour, les hommes y écoutent les deux baritons Bobby Curry et Roy Vautour, ainsi que le doux ténor Jimmy Sproul. Ils leur demandent de chanter leurs airs favoris : « Cockles and Mussel’s » ou « The rose of Traiee »
Le major Hickey et Jim Morell forment également une équipe de base ball qui deviendra la meilleure de l’armée canadienne.
Lorsque le bataillon s’installe à Woodstock, on commence à donner des autorisations de mariage. En revanche, on décide d’interdire l’entrée du camps à toute personne extérieure. Les flâneries en ville sont interdites, les maisons et les pelouses doivent être respectées, chaque homme doit avoir une coupe de cheveux réglementaire. Les visiteurs n’ont accès à l’île que le dimanche.
En août, d’autres instructions sont données. Nombre d’entre elles concernent la rivière. Il est interdit aux hommes d’y nager, particulièrement la nuit. On interdit toute correspondance avec des étrangers. Le bataillon prend la guerre au sérieux, chaque homme comprend que le North Shore va être lancé dans l’une des plus grandes aventures qui puisse connaître une unité. L’une des grandes qualités du North Shore est l’harmonie qui y règne entre les ethnies qui le composent. Il y a bien une rivalité entre la Compagnie Francophone et les autres, mais c’est sur une base amicale.
Le 5 décembre, le bataillon se déplace dans le Sussex. Alors que les hommes vivaient entre eux jusque là, ils doivent apprendre à vivre avec 5000 autres soldats.
Le 18 septembre 1940, le roi et la reine inspectent le North Shore
Lorsque le mois de juin arrive, tous les hommes sont bronzés. Le camp bruit de rumeurs annonçant le départ du régiment outre mer.
"C’était un matin de juillet qui serait passé inaperçu si un courrier ne m’avait pas remis une note convoquant tous les officiers chez le colonel Calkin. Nous avons alors compris que quelque chose de très important allait se produire. Le colonel nous annonça que allions partir outre mer. C’est étrange comme sensation. Nous attendions cet ordre depuis longtemps et pourtant cela nous a secoué. Certains ont regardé silencieusement dehors. Nous étions comme les personnages d’un tableau, immobiles, écoutant la voix du colonel".
La Grande Bretagne
La première image de l’Angleterre que découvrent ces hommes est celle de Liverpool détruite par les bombes. Partout, il y avait des bateaux coulés. Leur première pensée, après avoir accosté, était de nous éloigner le plus vite possible des quais. Ils apprennent très rapidement qu’ici les tickets de ravitaillement sont aussi importants que les tickets de train. On leur apprend également à marcher pendant une heure avec un masque à gaz.
En août, les premiers colis commencent à arriver du Canada. Certains reçoivent même des boîtes de conserve de langoustes.
L’entraînement se poursuit avec des marches de nuit par exemple, des cours de chiffre, de lecture de cartes.
En septembre, le bataillon s’est complètement habitué à ce nouveau mode de vie. Les entraînements se poursuivent, d’importantes quantités d’équipements neufs arrivent.
En octobre et novembre 1941 les entraînements continuent, dans le vent et le froid : lecture de cartes, patrouilles conférence, etc
Le 29 novembre, le North Shore se déplace à Chapelwood Manor. Le froid et le vent gelé rendent la vie difficile dans le camp.
Mars 1942 arrive, toujours nuageux et pluvieux. Encore des entraînements, des exercices de nuit et de jour.
En mai 1942, l’unité est déplacée une nouvelel fois près de Hailsham. C’est un lieu boueux quand il a plu, et humide même s’il fait beau.
Le North Shore est chargé de formé le Home Guard composé principalement de vétérans de la Première Guerre Mondiale. Ils prennent leur entraînement très au sérieux et les hommes du North Shore éprouvent beaucoup de respect pour eux.
L’entraînement du North Shore s’effectue désormais avec l’équipement et le matériel qu’il devra utiliser. Pour la première fois il évolue sous les tirs de balles en étant couvet par un bar-rage d’artillerie
Un autre exercice, « Harold », les conduit à marcher des milles dans une direction pour revenir sur leurs pas , de nuit, en dormant très peu.
Mi-septembre, tous les officiers de la 8e Brigade sont convoqués par le colonel Churchill. Il leur donne le bilan du débarquement terrible de Dieppe. Le major Général Keller annonce que la 3e division d’infanterie canadienne aura l’honneur de conduire la prochaine opération. , lorsqu’elle sera décidée. . Certains officiers mettent sérieusement en doute les chances de survie d’une telle opération.
En décembre 1942, les hommes de la compagnie « D », principalement des Canadiens Fran-çais, sont répartis dans les autres compagnies qui avaient conservé jusque là leurs caractéristiques locales . Cela permet d’éliminer en partie la rivalité qui existait entre elles.
Fin janvier 1943, le régiment peut parcourir avec son équipement complet entre 25 et 30 miles par jour.
En août 1943, le North Shore quitte Hassocks pour Monks Common et reprend un camp des Canadian Scottish.
Le régiment apprend l’utilisation des grenades fumigènes, le franchissement de barbelés
L’unité est déplacée ensuite à Ardrossan puis Huirsley.
Le 4 octobre, des hommes de tous les rangs sont transférés dans la 1ère Division Canadienne. De nombreux officiers y perdront la vie.
Le régiment commence a effectuer des exercices de débarquement appelés « Pirates ».
Le 27 octobre, le North Shore est déplacé à Boscombe, la banlieue est de Bournemouth.
L’entraînement est encore plus poussé. Il va falloir percer les défenses allemandes en Europe et le North Shore est l’un des bataillons choisi pour l’assaut.
Différents exercices leur apprennent les techniques de débarquement à partir de barges, de communication par signaux, d’évacuation des blessés, etc .
En mars le North Shore se déplace à Emsworth et trois semaines plus tard au camp de Chiworth.
Préparatifs du débarquement
A priori, les hommes embarquent à Southampton ainsi que dans la zone de rassemblement de « Picadilly Circus » sur l’île de Wight
C’est le général Keller qui commande la 3ème division d’infanterie canadienne.
Les objectifs de la 3 ème division d’infanterie canadienne sont :
Objectif YEW première étape
- Enfoncer le mur de l’Atlantique
- Prendre pied. Conformément aux plans, l’assaut s’effectue par deux brigades de front assignées chacune à des secteurs déterminés divisés eux-mêmes en sous-secteurs ainsi établis :
• La 7ème brigade envahit les plages MIKE et NAN-GREEN Grayes sur Mer et Courseulles-sur-Mer
• La 8ème brigade envahit les plages de NAN-WHITE et NAN-RED Bernières sur Mer et Saint Aubin sur Mer désignée sous le nom de code de « Cairo »
Pour ces Canadiens, ce débarquement est une revanche sur celui raté à Dieppe en 1942.
Le succès du plan dépendait dans une très large mesure de l’allure à laquelle pourraient être renforcées les troupes primitivement mises à terre. Il fallait, de toute nécessité, que le rythme d’arrivée de ces renforts dans la tête de pont dépasse celui de l’intervention des renforts alle-mands face à celle-ci.
Les troupes appareillèrent de Southampton, de la Solent et de Spithead.
Le vent n’était pas propice à la traversée vers la France. La Manche était agitée ; des vagues de cinq à six pieds en haute mer rendaient « très difficile la navigation des péniches de débar-quement chargées de troupes et de matériel. Jusque là, l’amélioration prévue par les météoro-logistes ne s’était pas pleinement réalisée. Navires et péniches de débarquement étaient vio-lemment ballottés et de nombreux soldats, et même des marins, étaient dans un piètre état. Mais sauf exceptions d’importance relativement faible, le voyage nocturne se passe comme prévu.
Le 6 juin à l’aube, le temps était maussade. Dans son rapport, l’amiral Ramsay le résume ainsi :
- Vent : Ouest-nord-ouest, vélocité 4 (un appendice au rapport traitait particulièrement
des assauts et ont u trouve ceci : « Vent d’ouest, vélocité 15 nœuds)
- Mer : Maniable, vagues de 3 à 4 pieds
Ciel : De clair à nuageux, les nuages s’amoncelant
Le point fortifié des défenses allemandes se situait surtout entre le chemin des Mouliers et la rue Gustave Canet où 2 pièces d’artillerie défendaient la plage : l’une orientée vers la mer, l’autre vers l’intérieur de la ville. Dans l’intervalle, des ouvrages en béton surplombant la mer se trouvaient des mitrailleuses et des mortiers disposés dans les maisons et les hôtels en front de mer.
Le débarquement
L’Assaut proprement dit fût précédé de bombardements d’appareils lourds de la 8e Force Aé-rienne. Malheureusement, en raison du mauvais temps et du souci de ne pas lancer les bombes trop tôt pour ne pas toucher les péniches de débarquement, la majorité d’entre elles tombent trop loin avec pour conséquence de laisser les défenses côtières presque intactes. De bombardements navals de contre-torpilleurs et de bâtiments d’appui ont également lieu afin de nettoyer les plages de leur feu. Les contre-torpilleurs devaient commencer à tirer environ 45 minutes avant l’heure H et ne s’arrêter qu’au moment où les premiers éléments de débarquement prendraient pied sur les plages. Les unités plus petites étaient chargées d’étoffer cers tirs .
Environ trente minutes avant l’heure H, l’artillerie d’armée automotrice devait ouvrir un feu d’extinction, depuis les péniches de débarquement, de chars où elle était embarquée, chaque régiment prenant à partie un des principaux « nid de résistance » des plages jusqu’à 5 minutes avant l’heure H. Les canons lourds montés sur les péniches de débarquement ouvriraient le feu 35 minutes environ avant l’heure H. Les L.C.T. (fusées) avaient pour mission de déclencher des salves successives, toutes leurs pièces tirant à la fois sur les mêmes objectifs depuis H moins 10 jusqu’à H moins 5. Quant aux L.C.A. (péniches d’assaut), leur rôle consistait à tirer juste avant que l’infanterie prenne pied sur les plages.
Même si les ouvrages défensifs en béton sont malheureusement peu avariés, le feu reste fortement concentré sur tout le front longeant la mer. On indique ainsi que à Saint Aubin sur Mer, « d’une façon générale les immeubles situés le long de la mer ont été détruits dans une proportion de 90% ». C’est-à-dire que les murs ayant été mis en brèche, les cloisons et les planchers se sont effondrés. La destruction a été telle que les immeubles ne pouvaient servir d’ abris aux canardeurs pendant le bombardement, bien qu’ils eussent pu s’y réfugier par la suite. On a estimé que le reste de la ville avait été fortement avariée dans une proportion de 30 à 40%. Les dégâts semblent avoir été causés surtout par le tir d’obus et non par des incendies.
L‘heure H pour le North Shore est fixée à 7H45. mais en raison du mauvais temps elle est finalement reculée à 7H55. C’est dommage car l’eau ayant monté davantage par suite de la marée, il devenait plus difficile d’enlever les obstacles des plages : « Les embarcatnirent le riions atteigvage parmi les obstacles plutôt que devant eux et il n’était pas possible d’enlever les obstacles extérieurs avant la marée descendante » (commodore Oliver). De fait, les obstructions et les mines qui y étaient reliées allaient faire des ravages parmi les embarcations.
Cependant, si les péniches sont relativement épargnées avant leur arrivée sur la plage, c’est pendant leur séjour sur les plages et peut-être davantage pendant leur manœuvre de retour qu’elles sont le plus gravement atteintes.
Les objectifs fixés au North Shore sont les suivants : S’emparer de la ville de Saint Aubin, préparer une base d’attaque pour le 48e commando des Royal Marine chargé de prendre Langrune, prendre Tailleville.
Les premiers soldats débarquent à 8H05 ou 8H10 sur la plage de « Riva Bella » sur un front d’environ 800 m de large. Cette première vague d’assaut se compose de deux compagnies : la A du major J.A. M.C. Naughton à l’ouest de la plage, et la B du major Forbes plus à l’est dans la zone du castel. Très rapidement, ils constatent que l’emplacement fortifié de Saint Aubin « ne semble pas avoir été touché » par le bombardement préliminaire.
La compagnie A
Son objectif est de dégager la plage sur la droite, alors que la compagnie B la dégagera sur la gauche. La compagnie A se heurte ainsi au réseau classique de défense : mitrailleuses, mortiers, mines, barbelés à triples rangées, pièges de toutes sortes. Elle tente de rentrer dans Saint Aubin par la rue du Maréchal Foch en subissant de lourdes pertes. C’est ensuite le combat de maison en maison qui s’avère très difficile dans la mesure où, chaque maison peut défendre la maison voisine et nombre d’entre elles sont minées et entourées de plusieurs rangées de barbelés. Dans toutes ces actions, la compagnie formée de 200 hommes en perd 29 : 9 morts et 20 blessés.
La compagnie B
Le gros morceau pour la compagnie B consiste à prendre le blockhaus et l’esplanade du castel garnie de mortiers et de mitrailleuses en passant par la route parallèle à la plage. Elle se porte à l’assaut mais rencontre de nombreux obstacles. L’appui des blindés amphibies du Fort Garry Horse est décisif. Ces chars spéciaux réduisent à l’explosif murs antichars et blockhaus. Le journal du bataillon indique que la zone était nettoyée dès 11H15, quatre heures et cinq minutes après le débarquement. Il semble toutefois que le tir isolé n’ait pas alors cessé et l’officier commandant la compagnie « B » déclare que les occupants de l’emplacement ne se sont définitivement rendus qu’à 6 heures du soir.
Le peloton n°6 restera sur place pour nettoyer la place forte allemande, inspecter les maisons et traquer les Allemands qui auraient pu se cacher dans les nombreux souterrains du village.
Les compagnies C et D
Ces deux compagnies débarquent quelque temps après la première vague d’assaut. Elles traversent à leur tour la plage le plus vite possible. Avec d’autres compagnies, elles se retrouvent dans un inextricable encombrement sur la plage : hommes, matériel, véhicules bloqués ou hors d’usage, sous le feu de l’ennemi.
Une fois les hommes à terre, et après avoir fait une brèche dans la digue, un bulldozer commence à nettoyer la plage de ses nombreux obstacles pour préparer l’arrivée des chars du Fort Garry Horsee. La bataille continue avec acharnement. Il y a 16 morts parmi la population, autant de blessés ; 70 maisons en flammes, 400 presque entièrement détruites ; les rapports officiels estiment les pertes des immeubles en front de mer à 90 %. Les francs-tireurs allemands sont à tous les points stratégiques, aux fenêtres et dans les souterrains.
Les blessés sont allongés contre la digue.
Au soir du 6 juin, 125 hommes du North Shore ont été tués ou blessés.
Le 6 juin 1944, le quotidien « La Presse » à Montréal titre : « Les Canadiens vont revoir la Normandie »